Inventaire piscicole RFID à l’île de La Réunion
L’approvisionnement en eau potable de la population de Saint Denis de La Réunion est réalisé en grande partie à partir du captage de Bellepierre. Suite à des travaux de réhabilitation et de sécurisation du captage et de la galerie d’amenée jusqu’à l’usine de potabilisation, pour lesquels Biotope a assuré une mission de coordination environnementale, une passe à poissons a été construite en 2017 en rive droite de l’ouvrage. Cette passe dite « multi-espèces », a pour objectif d’entamer un processus de restauration de la continuité écologique pour toutes les espèces aquatiques susceptibles de coloniser le corridor aquatique constitué par la rivière Saint-Denis.
Étant la première passe multi-espèces à La Réunion, un suivi environnemental a été demandé par l’arrêté préfectoral. En partenariat avec les Bureaux d’études Scimabio et Ichtyosphère, Biotope a alors été missionné afin de réaliser un suivi sur 3 ans de l’efficacité de la passe à poissons sur la remontée de 4 espèces indigènes migratrices de poissons . C’est dans ce cadre-là que nous avons réalisé pour la première fois un inventaire piscicole en vue de déployer la technologie RFID, une première mondiale pour ces espèces.
Les étapes de l’inventaire piscicole RFID
La première étape a été de marquer les 4 espèces cibles fixées par l’arrêté préfectoral, à l’aide de transpondeurs passifs : La loche des sables Awaous commersoni ; Le poisson plat Kuhlia rupestris ; Le chitte Agonostomus telfairii ; Le cabot noir Eleotris fusca.
Ces espèces ont été sélectionnées du fait de leur faible capacité de franchissement des obstacles car elles peuvent remonter les obstacles qu’elles rencontrent uniquement grâce à la nage contrairement à d’autres espèces (telles que les cabots bouche rondes qui sont dotés de capacité de franchissement très élevées, grâce à des ventouses leur permettant de remonter des cascades).
Dans un deuxième temps, la passe à poissons a été équipée par Scimabio, d’un dispositif de détection. Plusieurs antennes ont été placées dans la passe mais aussi en rivière (en aval de la passe). Ce dispositif a été mis en place dans le but de tester l’attractivité de la passe ainsi que sa franchissabilité par les espèces cibles. En effet avant de vérifier si les poissons parviennent à franchir intégralement la passe il faut vérifier son attractivité, c’est-à-dire vérifier s’ils parviennent à trouver l’entrée de la passe.
Au total lors de la première campagne de marquage en 2019, 223 individus avaient été capturés en pêche électrique directement dans la rivière Saint Denis, marqués puis relâchés en aval proche de l’obstacle et de la passe à poissons associée à expertiser.
Des résultats encourageants
Les résultats de la 1ère campagne de marquage sont encourageants : Au total, 23 % des individus ont été détectés , correspondant majoritairement à des individus appartenant aux espèces pélagiques (à 98%) (Agonostomus telfairii et Kuhlia rupestris). Parmi les espèces benthiques marquées (Awaous commersoni et Elelotris fusca), seul un individu a été détecté, témoignant, a priori, d’une plus faible mobilité vers l’amont de cette espèce sur la période analysée.
En juin 2021, SCIMABIO avec l’appui de BIOTOPE a remis en fonctionnement le dispositif de détection au niveau de la passe à poissons et une nouvelle campagne de capture/marquage/relâcher a été menée avec 167 poissons parmi les 4 espèces marquées suivant la distribution suivante.
L’objectif de marquage minimal de 30 individus par espèce a été atteint en 2021 pour l’ensemble des espèces, excepté pour la loche des sables.
L’effort de marquage sur les 2 espèces benthiques (Awaous commersoni et Eleotris fusca) relativement faible en 2019 est en hausse en 2021 ce qui permettra de fournir probablement davantage de robustesse aux résultats associés à ces dernières.
Une dernière campagne de marquage aura lieu en 2022.
A ce jour, le bilan est positif pour les 2 espèces pélagiques qui franchissent correctement la passe. Concernant les 2 espèces benthiques qui ont été très peu détectées, le bilan est mitigé. Notre travail va maintenant consister à comprendre si les benthiques ne franchissent pas la passe parce qu’ils n’y parviennent pas ou bien parce qu’ils n’en ont pas besoin.